Fédération de la Haute-Vienne de la Libre Pensée

Ils n’ont que le mot laïcité à la bouche, mais…

  • 5 décembre 2020

    A quelques jours du 115ème anniversaire de la promulgation de la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat du 9 décembre 1905, nous avons pensé utile de faire la clarté sur l’action de ceux qui aujourd’hui dans les sphères gouvernementales se disent être des gardiens de la Laïcité. Nous publions à ce propos ci-dessous un article que nous a envoyé Alain Visseq, directeur de la revue Laïcité & Pensée Libre.

     « L'Etat chez lui, l'Eglise chez elle »

    (citation extraite d'un discours de Victor Hugo prononcé le 14 janvier 1850 à l'Assemblée nationale)

    Le 9 décembre 2020 est le 115ème anniversaire de la loi de 1905 de Séparation des Eglises et de l'Etat.

    2020 aura été aussi l’année du 60ème anniversaire du « Serment de Vincennes » : le 19 juin 1960, 400 000 laïques rassemblés à Vincennes représentant 10 813 697 pétitionnaires, faisaient le serment de lutter sans trêve et défaillance jusqu'à l'abrogation de la loi Debré et rappelaient une exigence élémentaire de la démocratie : fonds publics uniquement à l'école publique.

    Cette séparation salutaire fut affichée dès le 28 avril 1871 par la Commune de Paris sur les murs du 3ème arrondissement : « Ce que vous réclamiez est un fait accompli pour notre arrondissement (…) à partir de ce jour la direction des écoles congréganistes est confiée à des instituteurs laïques »

    Il n'est pas question pour les laïques de considérer que 60 années de détournement de fonds publics auraient, au fil du temps, légitimé cet état de fait.

    Macron, Blanquer, Darmanin n'ont que le mot laïcité à la bouche mais le ministre Blanquer a aggravé la loi Debré en autorisant le financement des écoles maternelles privées.

    A contrario, il nous revient de rappeler sans cesse que la défense de la République et de la laïcité ce sont tout d’abord des principes et des exigences :

    L'ABROGATION DE LA LOI DEBRE,

    L'ABROGATION DE TOUTES LES LOI ANTI-LAÏQUES ET DE LA DERNIERE EN DATE, LA LOI BLANQUER.

    Voici ce qu'écrit un instituteur laïque dans le bulletin « Laïcité & Pensée Libre » n° 8 :

    (…) les fonds publics dédiés à l'école privée confessionnelle se montent à 14 753 865 293 euros. Alors que les écoles ont été fermées pendant près de deux mois (...), ces 14 ou 15 milliards d'euros auraient été indispensables à une véritable reprise de l'Ecole publique

    afin que les élèves puissent retrouver les conditions d'un véritable rattrapage du retard scolaire accumulé(...)

    La rentrée chaotique que connaissent élèves et professeurs rend inapplicables les consignes sanitaires et met en danger élèves et personnels.

    Elle exige le recrutement massif d’enseignants, de surveillants et d’agents de service et l’ouverture de locaux pour permettre d’alléger les effectifs des classes.  Cela rend l’exigence de la confiscation de ces 14 milliards détournés plus urgente encore.

    On le sait, les milliards des « plans de relance » sont destinés exclusivement aux banquiers et aux patrons. Et… « certaines paroisses comptent en profiter également qui ont demandé aux banques des emprunts garantis par l'Etat : 700 millions d'euros pour, selon le responsable ecclésiastique interrogé, compenser les pertes liées au Covid 19 (vente de bougies, dons, etc.)  

    Il nous revient de rappeler que la République est une et indivisible et que la volonté de balkaniser l'école publique procède du vieux fatras réactionnaire.

    La loi Blanquer, à la suite des lois précédentes, notamment la loi Peillon, c'est :

    -des perspectives d'innovations afin de s'adapter aux besoins et aux spécificités des territoires

    -des modifications par voie d'ordonnances du fonctionnement et des attributions des conseils académiques et départementaux (…) au plus près des spécificités de chaque territoire

    -des cités éducatives où maire, préfet et directeur académique assignent à un quartier des missions différant des autres secteurs scolaires.

    De gouvernement en gouvernement, la laïcité, l'école publique sont mises à mal. Le ministre Blanquer qui restera dans l'histoire comme celui qui a la volonté de liquider le baccalauréat, en tant que qu’examen national, anonyme égal pour tous, voue la jeune génération à la loterie de Parcoursup, s'acharne à refuser un enseignement complet pour tous les élèves de la maternelle au lycée. 

    Pour appliquer ces mesures réactionnaires il faut faire appel à l’arsenal répressif de la Vème République et le renforcer. Ses décisions iniques qui ne sont approuvées que par lui ou le « syndicat » de lycéens qu’il a lui-même promu s’accompagnent de lourdes sanctions administratives : 4 professeurs de Melle (Deux-Sèvres) ont été sanctionnés pour s’être opposés à la mise en place d’épreuves conduisant à la liquidation du baccalauréat.

    En fermant les universités et mettant l'instruction à mi-temps, les étudiants sont une « génération sacrifiée ! », disent les universitaires. Et la répression s’amplifie : dans le cadre de la loi de programmation de la Recherche, le 9 novembre, une commission mixte Sénat-Assemblée Nationale menace d’un an de prison de 7500 euros d’amende « toute action visant à troubler la tranquillité et le bon ordre des universités. »

    « Cette loi met en cause la franchise universitaire qui avait été arrachée à l’Eglise en 1253 par Robert de Sorbon en fondant la Sorbonne, c’est-à-dire en faisant échapper l’université à la police et à l’Etat. », déclare une enseignante-chercheuse de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales. »

    Il nous revient de défendre les droits et la démocratie bafouée. L'instruction est un droit !

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    Cette politique réactionnaire ouvre la voie à une proposition de loi anti-républicaine initialement appelée loi contre le séparatisme. En effet, s'appuyant sur l'indignation suscitée par les horribles crimes terroristes qui viennent d'endeuiller la France, le président Macron propose de présenter le 9 décembre 2020, le jour même du 115ème anniversaire de la loi de séparation des Eglises et de l'Etat, une loi « confortant les principes républicains ».             

    Ce projet de loi est l'inverse de la loi de 1905 qui est une loi d'apaisement et de libertés qui assure la liberté de conscience, garantit le libre exercice des cultes.

     Ce projet de loi est avant tout répressif et n'a rien à voir avec la laïcité. Les crimes terroristes sont des crimes politiques perpétrés par des extrémistes et qui relèvent de la sécurité publique. D'ailleurs, même les données du ministère de l'Intérieur le prouvent : depuis 2017 ont été fermés comme lieux de dérive séparatiste, 158 débits de boissons, 15 lieux de culte et 4 écoles.

    L'état de droit républicain n'est pas démuni face à ces actes ignobles. Quant à labelliser les imams, c'est un non-sens. Qui pourrait délivrer ce label ? La religion musulmane n'a pas de clergé centralisé et c'est une intrusion de l'Etat dans le fonctionnement d'une religion ce qui est contraire à la loi de 1905 de séparation des églises et de l'Etat.

    Le mouvement ouvrier et le mouvement laïque ne sont-ils pas confrontés à une offensive sans précédent ?

    -Quelle légitimité a ce régime anti laïque qui prétend remettre en cause une loi constitutive de la République à la date choisie par provocation du 9 décembre, loi qui puise dans les combats émancipateurs de la Commune de Paris : la séparation des Eglises et de l’Etat ?

    -Quelle légitimité a ce régime policier qui prétend remettre en cause les libertés fondamentales jusqu’aux franchises universitaires, vieilles de 8 siècles ?  

    Alain Visseq

    Directeur de la revue Laïcité & Pensée Libre

    Mauguio, le 1er décembre 2020