Fédération de la Haute-Vienne de la Libre Pensée

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Notre demande de réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de la guerre de 14-18

  • 5 janvier 2021

    Vous trouverez ci-dessous la lettre envoyée le 16 novembre dernier par la fédération de Haute-Vienne de la Libre Pensée à Emmanuel Macron au sujet de la demande de réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de la guerre de 14-18. Nous publierons la réponse très prochainement.

    A Monsieur Emmanuel Macron

    Président de la République française

    Palais de l'Élysée,

    55, rue du Faubourg-Saint-Honoré

    75008 Paris

    A Limoges, le lundi 16 novembre 2020.

     

    Monsieur le Président de la République française,

    Dès 2011, la Fédération de la Haute-Vienne de la Libre Pensée s’est adressée à l’ensemble des communes de la Haute-Vienne pour leur proposer le vote d’une motion exigeant la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de la guerre de 14-18.

    Depuis, 149 communes*, sur les 195 que compte désormais la Haute-Vienne, ont voté une délibération dans le sens de la réhabilitation collective. Cela représente 76 % des communes du département. Le nombre d’élus de ces 149 conseils municipaux s’élève à 2 300.

    A l’appui de ces expressions, nous nous adressons à nouveau au représentant de l’Etat français que vous êtes, pour vous demander de décider, enfin, une réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de la guerre de 14-18.

    La responsabilité de Chef des armées, que vous confère l’article 15 de la Constitution, ne vous engage-t-elle pas sur la conduite des conflits et les pratiques qui s’y développe ? D’autant, qu’au titre de Chef des armées, vous êtes appelé à présider les conseils et comités supérieurs de la Défense nationale.

    L’existence de fusillés pour l’exemple au cours de la première guerre mondiale, évalués par l’Etat français à 639 hors droits communs, témoigne d’une pratique qui, si elle n’engage pas votre responsabilité d’actuel Président de la République sur les actes commis alors, l’engage, d’une part, sur le fait de savoir si de telles pratiques peuvent encore avoir cours aujourd’hui et d’autre part, sur la justice à rendre à ces soldats.

    De ce point de vue, on ne peut se satisfaire de ce qu’a écrit François-Xavier Lauch, alors chef de votre cabinet, à Éric Viot, historien considérant qu’"Il ne s’agit pas d’un sujet politique" (écrit rapporté par le site "tv5monde"). Pourtant, que signifie "fusillés pour l’exemple" : être pris au hasard parmi les soldats ; être fusillé ; cela, à titre d’exemple ; en représailles à des actes dont on ne connaît pas le ou les auteurs. Est-ce digne d’une Nation se réclamant des droits de l’Homme ?

    Plus d’un siècle après la fin de cette guerre, un chef d’Etat français ne peut-il faire ce qu’aucun de ses prédécesseurs n’a voulu faire jusqu’alors et prendre position pour une réhabilitation collective des 639 soldats français fusillés pour l’exemple. C’est ce que nous vous demandons à l’appui de 149 motions votées par des conseils municipaux de Haute-Vienne, auxquelles d’autres sont appelées à s’ajouter. N’oublions pas que ce conflit épouvantable a fait près de 19 millions de morts dans le monde (10 millions de militaires et 9 millions de civils).

    Parmi les 639 fusillés, pour l’exemple, par des balles françaises, sur décision de tribunaux militaires d’exception, 7 étaient originaires de Haute-Vienne :

    Jean FAUCHER, né à Limoges le 1er juin 1889. Peintre en bâtiment. Fusillé le 22 février 1916.

    Il avait 26 ans.

    Charles Francis FOURNERIE, né à Limoges le 4 novembre 1889. Cordonnier. Fusillé le 22 mars 1916.

    Il avait 26 ans.

    Jacques GAUTHIER, né le 5 août 1877 à Peyrilhac. Peigneur de chanvre. Fusillé le 7 avril 1916.

    Il avait 39 ans.

    Nicolas LEBOUTET, né à Limoges le 28 février 1894. Fusillé le 29 mars 1915

    Il avait 21 ans

    Pierre MILLANT, né à Ambazac le 13 novembre 1886.Clerc de notaire. Fusillé le 11 juin 1916.

    Il avait 29 ans. Réhabilité le 20 mai 1926

    Antoine MORANGE, né le 20 septembre 1882 à Champagnac la Rivière. Ouvrier. Fusillé le 20 avril 1915.

    Il avait 33 ans. Réhabilité le 29 juin 1934

    Pierre TRANCHANT, né à Limoges le 30 janvier 1895.Ouvrier Porcelainier. Fusillé le 1er août 1915

    Il avait 20 ans.

    Les communes de Champagnac-la-Rivière, Peyrilhac et Ambazac ont organisé, ces dernières années, des cérémonies et fait apposer des plaques ou des stèles en hommage à ces jeunes gens natifs de leurs communes. La ville de Limoges a fait graver le nom des 4 fusillés pour l’exemple de Limoges sur le monument érigé en 2018, quoique sans la mention "fusillé pour l’exemple".

    Avec 76 % de ses communes, notre département fait valoir le caractère inacceptable de cette pratique barbare. A l’heure où notre pays est particulièrement touché par des crimes odieux relevant précisément de la barbarie, il nous paraît primordial de rappeler les valeurs auxquelles nous tenons fondamentalement, valeurs de paix, de fraternité, d’égalité, de justice.

    Notre fédération de libres penseurs poursuivra les combats pour la laïcité, la liberté de conscience, le pacifisme, l’émancipation humaine, les libertés dans le but que nous soyons toujours plus nombreux à soutenir ces valeurs.

    Veuillez agréer, Monsieur le Président de la République française, l’expression de nos salutations laïques et républicaines.

    Pour la Fédération de la Haute-Vienne de la Libre Pensée,

    Son président

    Loïc LE DIUZET

    * 9 anciennes communes sont regroupées, depuis 2015, dans 3 nouvelles communes. 6 d’entre elles avaient signées une motion avant le regroupement. Ainsi, aux 149 motions prises en compte, 6 autres viennent s’ajouter d’anciennes communes, ainsi que deux, des Départements de la Corrèze et de la Haute-Vienne et une de l’ancien Conseil Régional du Limousin (soit au total 158 motions ou vœux adoptés).

    En pièces jointes et ci-dessous la carte du département 87, réalisée par la fédération de Haute-Vienne de la Libre Pensée, faisant état des communes ayant voté une motion et de celles qui ne l’ont pas encore fait.

    Au 1er janvier 2021 ce sont désormais 151 communes sur les 195 du département qui ont voté une motion exigeant la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple, soit 77% des communes.