Rapport sur les inégalités en France
- 5 juin 2021
L'Observatoire des inégalités a été fondé en 2003. Il se veut un organisme indépendant et a notamment recours au financement participatif pour éditer des ouvrages. Se basant sur les publications de l’Insee et de différents ministères, il publie tous les deux ans, le Rapport sur les inégalités en France, qui dresse un état des lieux des inégalités en matière de revenus, d'éducation, de travail et de conditions de vie (www.inegalites.fr).
L’édition 2021 de ce rapport a été publiée cette semaine, mercredi 2 juin. Il nous a semblé intéressant pour les abonnés à La Pensée Libre, d’en publier de brefs extraits, les chiffres publiés n’ayant besoin d’aucun commentaire. Comme vous pourrez le lire, ils attestent que nous vivons dans une société encore très inégalitaire, où les classes sociales aux intérêts antagoniques existent toujours bel et bien. Contrairement aux assertions serinées par les gouvernants et les chaines d’info en continu, les citoyennes et citoyens ne sont pas tous sur le même bateau. Ils ne sont pas égaux, ni face à la crise sanitaire, ni face à la crise sociale et il est bon de le rappeler.
Que chacun en prenne pleinement conscience et s’engage pour changer cet état de fait, pour jeter les bases d’une société égalitaire, fraternelle, débarrassée des guerres, du profit et de l’oppression.
Extraits du Rapport
Revenus :
-Le niveau de vie médian est de 1 771 euros mensuels pour une personne seule après impôts et prestations sociales (donnée 2018). Il partage la population en deux : la moitié touche moins, la moitié davantage. Selon les définitions qu’utilise l’Observatoire des inégalités, une personne est considérée comme pauvre quand elle vit avec moins de 885 euros par mois, soit la moitié du niveau de vie médian.
-En moyenne, les 10 % des Français les plus pauvres ont un niveau de vie égal à 715 euros par mois. On est riche à partir de 3 542 euros par mois, le double du niveau de vie médian.
Le niveau de vie moyen des 10 % les plus riches est de 5 090 euros mensuels. Les 10 % du haut de l’échelle des revenus touchent en moyenne 7,1 fois ce que touchent les 10 % du bas, après impôts et prestations sociales. Chaque mois, ils gagnent en moyenne 4 375 euros de plus que les 10 % les plus modestes, soit l’équivalent de 3,5 smic en plus.
-À eux seuls, les 10 % les plus fortunés possèdent 46,4 % de l’ensemble du patrimoine des ménages. Le patrimoine médian des ouvriers non qualifiés (la moitié possède moins, l’autre moitié plus) est de 12 300 euros, endettement déduit.
Chez les cadres supérieurs retraités, il est de 397 000 euros, soit 32 fois plus. Des fortunes immenses s’accumulent au sein d’une poignée de familles : celle de Bernard Arnault, patron de LVMH, possède, par exemple, un patrimoine équivalent à la valeur de l’ensemble des logements de Toulouse.
-Le taux de pauvreté a augmenté de 7.7% en 2009 à 8.2% en 2019. Le taux de pauvreté des 18-29 ans est passé de 8.2% en 2002 à 12, 5% en 2018, une progression de 50% (source Insee 2018, avant la pandémie)
Éducation :
-23 % des plus de 25 ans n’ont aucun diplôme ou seulement un certificat d’études. Un tiers des 25-29 ans a au mieux un CAP ou un BEP en poche. À l’autre bout de l’échelle sociale, les diplômés de niveau bac + 3 ou plus représentent 20 % de la population.
-Les étudiants originaires de milieux populaires sont sous-représentés à l’université. 12 % des étudiants en licence ont des parents ouvriers. Les enfants d’ouvriers ne représentent que 8,5 % des étudiants en master et 5,9 % en doctorat. À ce niveau d’études, l’université opère pratiquement le même tri social que les grandes écoles. Le système des grandes écoles est, quant à lui, élitiste dès l’entrée en classe préparatoire : seuls 7 % des élèves de prépa ont des parents ouvriers. Après le concours d’entrée, leur part passe à 5 % dans les écoles d’ingénieurs, 4 % à l’ENA et elle est même nulle à Polytechnique.
Travail :
-Déjà, avant le début de la crise sanitaire, le mal-emploi (chômage, CDD et intérim) était très inégal. Le taux de chômage des ouvriers non qualifiés est cinq fois plus élevé (17,7 %) que celui des cadres supérieurs (3,5 %), selon les dernières données disponibles (Insee, 2019). Le diplôme constitue la fracture la plus grave. 15,8 % des non-diplômés sont au chômage. Ce taux est divisé par trois pour les détenteurs d’un bac + 2.
-52,7% des jeunes de 15 à 24 ans qui travaillent ont un contrat précaire en 2019.
-Les immigrés sont également en situation défavorable sur le marché du travail. Souvent moins diplômés, ils sont aussi victimes de discriminations à l’embauche, y compris de l’interdiction légale d’exercer certaines professions, appliquée aux personnes nées hors de l’Union européenne. 16 % des immigrés nés hors de l’Union européenne sont au chômage, deux fois plus que les Français nés en France. Lorsqu’ils travaillent, 59 % des immigrés sont à des postes d’employés ou d’ouvriers, contre 46 % des non-immigrés.
-Les inégalités en matière de pénibilité physique du travail sont immenses, avec des conséquences souvent durables et graves sur la santé. Plus de 60 % des ouvriers ont un travail pénible physiquement, dix fois plus que les cadres supérieurs.
Modes de vie :
-Deux millions de personnes vivent dans un logement inconfortable et 900 000 dans une surface trop petite. Plus grave encore, près de 300 000 personnes n’ont d’autre logement qu’une place, parfois à la nuit, dans une structure d’accueil pour les sans domicile ou les demandeurs d’asile. Les conditions de logement sont très inégales selon les niveaux de revenus. 29 % des couples et familles parmi les 10 % les plus pauvres ont un logement trop petit.
-Logement trop petit, tabagisme, accès aux soins et surtout travail éprouvant physiquement : les conditions matérielles de vie ont un effet déterminant sur la santé.
À 35 ans, un ouvrier peut espérer vivre jusqu’à 77,6 ans. Soit six années de moins qu’un cadre supérieur (84 ans).
-¼ des adultes handicapés de moins de 60 ans vivent avec moins de 1 000 euros par mois.
-Sur dix maires, deux seulement sont des femmes. À ce niveau de responsabilité, la part des femmes progresse très lentement, de 14 % en 2008 à 20 % en 2020.
-Des discriminations, à la fois illégales et particulièrement violentes par leur injustice, affectent la vie quotidienne des immigrés et des personnes non blanches.
Plus de 500 000 personnes subissent au moins une injure raciste chaque année. Même les services de l’État, censés être exemplaires, sont concernés par les pratiques discriminatoires. 22 % des hommes qui se disent perçus comme Arabes déclarent avoir été contrôlés par la police plus de cinq fois au cours des cinq dernières années, une proportion dix fois plus élevée que celle déclarée par les hommes blancs.