Fédération de la Haute-Vienne de la Libre Pensée

LETTRE OUVERTE AUX CITOYENNES ET AUX CITOYENS AU SUJET DES OSTENSIONS

  • 20 mai 2023

    Madame, Monsieur,

    Tous les 7 ans, depuis le XIème siècle, l’église catholique, à l’appui de comités et, depuis cette année, d’une association, organise des initiatives dénommées « Ostensions septennales limousines » (73e édition en 2023). Nous souhaitons nous adresser à vous à ce sujet pour plusieurs motifs : l’obscurantisme dont les ostensions sont porteuses, le refus de la science et de la raison qu’elles entretiennent et l’attaque à la laïcité qu’elles sous-tendent.

     

    SUR QUOI REPOSENT CES MANIFESTATIONS OSTENSIONNAIRES ?

     

    LE MAL DES ARDENTS

    Il s’agit d’une maladie qui sévit, sous des formes différentes, en Europe, en France et en Limousin au Xème siècle. Elle généra des millions de morts. La science, et non l’église catholique, a découvert que cette maladie était due à l’ergot de seigle. C’est pourquoi elle a pris le nom d’ergotisme. L’ergot est un parasite du seigle qui contamine les aliments élaborés avec cette céréale (notamment le pain). L’organisation d’un jeûne, en 994, a mis fin à l’expansion de la maladie. Mais celle-ci ne s’est pas arrêtée du jour au lendemain. Nombreux sont ceux qui, après le début du jeûne, ont continué à mourir de leur infection ou à en souffrir durablement. Le jeûne a au moins empêché de nouveaux cas.

     

    LE FOND EXTRÊMEMENT RÉTROGRADE ET OBSCUR

     

    LE « MIRACLE » DES ARDENTS

    L’église catholique a alors imaginé un moyen d’exercer une pression supplémentaire sur la population. Elle eut l’idée d’exhiber des ossements de gens qualifiés de « saints » pour expliquer la fin de l’épidémie. Aujourd’hui, qui peut croire un instant à une telle absurdité ? Dans une France illettrée et analphabète, on peut comprendre que cela ait pu marcher, mais aujourd’hui ? De surcroît, n’est-il pas particulièrement sinistre et indécent d’exhiber des ossements au prétexte qu’ils appartiendraient à des « saints » ?

     

    LA FRAGILISATION DE LA LAÏCITÉ

    Depuis 1905, la loi octroie à chacune et chacun la liberté de conscience. De la sorte, toutes et tous sommes libres d’être athées, agnostiques ou de croire en un ou plusieurs dieu(x). Cette liberté étant garantie par la Loi de séparation des églises et de l’État.

    C’est ce que l’on appelle la laïcité institutionnelle. Dès lors, toutes les institutions de la République se doivent d’être neutre vis-à-vis des religions comme de l’athéisme, sans quoi c’est la liberté de conscience qui est atteinte. Cependant, à la faveur des ostensions, nous constatons que des maires participent (en tant qu’élus et non à titre privé) à certaines cérémonies religieuses : ils détiennent des clés des châsses contenant les ossements (objets des exhibitions ostensionnaires), participent à l’ouverture de celles-ci, financent la réalisation d’expositions traitant des ostensions, mettent des halls de mairies à disposition d’expositions parlant des ostensions, prêtent du matériel municipal pour installer des décors, font largement la publicité du programme de ces manifestations de l’église catholique, etc. Outre l’attribution de moyens financiers ouverts ou déguisés à un évènement religieux, pourtant interdite par la loi, c’est la liberté de conscience des citoyennes et des citoyens qui est ainsi remise en cause.

     

    LE REFUS DE L’APPORT ESSENTIEL DE LA SCIENCE ET DE LA RAISON

     

    À PROPOS DES OSSEMENTS

    Une analyse, par la science encore, a montré, par exemple, qu’un crâne d’un certain Bidens était composé à 90% de papier mâché. Il s’agit donc d’un crâne… reconstitué ! Il viendrait de Rome. On ne sait pas vraiment ce qu’il fait là mais ce que l’on sait : l’église catholique pratiquait couramment l’envoi d’ossements un peu partout dans le monde pour entretenir les peurs. En créant des reliques, l’église catholique organise des pèlerinages très lucratifs.

    On apprend encore, mais c’est toujours la science qui le permet, qu’un des os trouvé dans la châsse d’un certain Monsieur Léonard (lui aussi affublé du qualificatif de « saint ») n’appartient pas au reste du squelette présent dans la boîte. Les premières observations scientifiques réalisées révèlent encore que ce squelette n’a pas dépassé l’âge de 40 ans. Or, une hagiographie du XIème siècle de ce Monsieur Léonard indique qu’il est mort à l’âge de 63 ans. Alors, à qui sont ces ossements ? D’ailleurs, ne serait-il pas intéressant de procéder à l’analyse de l’ensemble des ossements donnés à la vénération du public tous les 7 ans (carbone 14, analyses ADN, etc.) afin d’en savoir plus à leurs propos. Mais l’église catholique s’y refuse. Elle sait trop bien que cela remettrait en cause des siècles de délire autour de prétendus « miracles » qui seraient dus à de prétendus « saints ». Des ossements n’ont-ils pas été exhibés en 2021 à Limoges pour prétendre repousser le Covid ou dans les Pyrénées, début mai 2023, pour qu’il pleuve… Et on voit le résultat.

     

    CULTUREL OU RELIGIEUX ?

    À cette question qui revient en permanence s’agissant des ostensions, le Conseil d’État, la plus haute juridiction de la République, a répondu le 15 février 2013 par 2 arrêts les qualifiant d’évènements cultuels, ne permettant pas de financements publics, conformément à la Loi de 1905. De ce fait, les comités ostensionnaires ont dû rembourser les dizaines de milliers d’euros versés par les collectivités pour les ostensions de 2009. Avant le Conseil d’État, le Tribunal administratif de Limoges en 2009 et la Cour administrative d’appel de Bordeaux en 2010 avaient rendu le même jugement. Pourquoi donc les représentants de l’église catholique insistent-ils tellement sur le caractère « culturel » de ces initiatives ? Tenter de minimiser leur aspect religieux et capter ainsi des aides ou des subventions déguisées … ?

    Qu’est-ce qui fonde le caractère culturel d’un événement ?

    Dictionnaire Larousse - Définition du mot culture : « enrichissement de l’esprit par des exercices intellectuels », « ensemble de connaissances dans un domaine particulier », « ensemble de phénomènes matériels et idéologiques qui caractérisent un groupe ethnique ou une nation, une civilisation, par opposition à un autre groupe ou à une autre nation », « développement de l’humanité par le savoir », « ensemble de signes caractéristiques du comportement des individus d’un groupe social qui les différencient de quelqu’un appartenant à une autre couche sociale que la sienne », « ensemble de traditions technologiques et artistiques caractérisant tel ou tel stade de la préhistoire ».

    Si les ostensions n’entrent pas dans cette définition, c’est qu’elles n’ont rien à voir avec la culture ! Peut-être ont-elles à voir avec la tradition ? Mais là, c’est une face bien triste de notre histoire qui se cache derrière ces initiatives. En effet, les ostensions sont nées dans une France où l’écrasante majorité de la population n’avait pas accès à l’instruction. Une France de femmes et d’hommes entièrement soumis, parce que ne sachant ni lire, ni écrire. Une France où l’église avait la mainmise sur l’État, où les sujets devaient aller aux offices religieux, ne pouvaient échapper au baptême, au mariage religieux, aux obsèques religieuses, etc. La peur et les superstitions étaient généralisées dans toutes les populations. Dès lors, face à un événement grave tel l’ergotisme, les croyances pouvaient apparaître comme « le » recours. Les populations n’avaient pas le choix. Il n’existait pas de citoyen(ne)s. Est-ce parce que la soumission a duré si longtemps qu’il faudrait considérer les ostensions comme ayant une dimension culturelle et/ou patrimoniale ?

     

    L’ÉGLISE CATHOLIQUE

    Participer aux ostensions ne doit pas masquer ce que l’on sait désormais de l’église catholique. Ces dernières années, la presse et trop peu souvent la justice ont révélé le caractère criminel de l’église catholique. Nous savons désormais que de par le monde, cette organisation a caché de nombreux crimes (trafics d’enfants, dissimulations de corps d’enfants morts, pédocriminalité, viol de religieuses). Cela concerne des millions de victimes à l’international et la France n’est pas épargnée : en mars 2021, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’église en France a estimé qu’au moins 2,5% à 2,8% de prêtres et religieux ont commis des agressions sexuelles ou des viols sur environ 216 000 victimes. Et le comble, ces crimes ne peuvent pas être traduits devant la justice civile de la République, l’église étant dispensée de comparaître en vertu du droit canonique !

    Face à cela, les Libres Penseurs ont du mal à voir dans les ostensions le seul côté festif (où tout serait amour) quand l’organisation qui les promeut est à ce point entachée de tant de faits graves et violents. Nous menons d’ailleurs combat pour que ces crimes soient punis par la justice à laquelle, pour l’instant, l’église échappe avec la complicité des États.

    Libre à quiconque de manifester pour ce qu’il veut, de participer ou non aux ostensions, mais libre aussi à chacune et chacun de porter un regard critique sur les évènements. Les ostensions ne méritent pas de démonstration d’enthousiasme, ni d’encouragements. Le siècle des Lumières n’a pas fini de propager ses ambitions de liberté.

     

    NON À L’OBSCURANTISME ! OUI, AUX SAVOIRS, À LA SCIENCE ET À LA RAISON !

     

    Pour cela et pour célébrer l’anniversaire de la naissance de la première République, la Fédéraon de Haute-Vienne de la Libre Pensée organise

    Samedi 23 septembre 2023 à la Salle des Fêtes de Saint-Brice (87) un grand Banquet Laïque et Républicain, vers une fête annuelle à venir.