REDÉCOUVRIR LA CONSTITUTION DU 6 THERMIDOR DE L’AN I (24 JUIN 1793)
- 5 septembre 2023
Il y a des actes de notre histoire que les puissants d’aujourd’hui ne veulent toujours pas reconnaître et faire connaître, car la crainte d’un réel changement par le « petit peuple » est toujours vivace en eux.
Il y a des dates et des événements qui montrent que l’ordre injuste des choses n’a rien d’irréversible. Des moments où l’histoire s’accélère et où l’impossible survient. L’année 1793 est de ceux-là. On ne refait pas le monde tous les jours, mais en pleine révolution un peuple l’a refait, en adoptant une Constitution la plus démocratique jamais rédigée dans notre pays.
Article 1. Le but de la société est le bonheur commun. Le gouvernement est institué pour garantir à l’homme la jouissance de ses droits naturels et imprescriptibles.
Article 3. Tous les hommes sont égaux par la nature et devant la loi.
Article 4. La loi est l’expression libre et solennelle de la volonté générale ; elle est la même pour tous.
Article 5. Les peuples libres ne connaissent d’autres motifs de préférence, dans leurs élections, que les vertus et les talents.
Article 6. La liberté est le pouvoir qui appartient à l’homme de faire tout ce qui ne nuit pas aux droits d’autrui
Article 9. La loi doit protéger la liberté publique et individuelle contre l’oppression de ceux qui gouvernent.
Article 18. Tout homme peut engager ses services, son temps, mais il ne peut se vendre ni être vendu ; sa personne n’est pas une propriété aliénable.
Article 21. Les secours publics sont une dette sacrée. La société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d’exister à ceux qui sont hors d’état de travailler.
Article 22. L’instruction est le besoin de tous. La société doit favoriser de tout son pouvoir les progrès de la raison publique, et mettre l’instruction à la portée de tous les citoyens.
Article 23. La garantie sociale consiste dans l’action de tous, pour assurer à chacun la jouissance et la conservation de ses droits ; cette garantie repose sur la souveraineté nationale.
Article 24. Elle ne peut exister, si les limites des fonctions publiques ne sont pas clairement déterminées par la loi, et si la responsabilité de tous les fonctionnaires n’est pas assurée.
Article 25. La souveraineté réside dans le peuple ; elle est une et indivisible, imprescriptible et inaliénable.
Article 26. Aucune portion du peuple ne peut exercer la puissance du peuple entier ; mais chaque section du souverain assemblée doit jouir du droit d’exprimer sa volonté avec une entière liberté.
Article 34. Il y a oppression contre le corps social lorsqu’un seul de ses membres est opprimé. Il y a oppression contre chaque membre lorsque le corps social est opprimé.
Article 35. Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.
Article 118. Le peuple français est l’ami et l’allié naturel des peuples libres.
Article 120. Il donne asile aux étrangers bannis de leur patrie pour la cause de la liberté- Il le refuse aux tyrans.
1793 : la France vient à peine de naître comme République qu’elle est assaillie par une coalition menée par toutes les puissances des pays riverains. Elle en sort victorieuse et met en place les lois de bienveillance, les comités de secours actifs. L’école gratuite et obligatoire est votée, la sécurité sociale et la retraite des vieux travailleurs décrétées. Un immense effort de volonté républicaine et démocratique, un courage infini pour sauver et construire un nouveau régime.
Malheureusement, cette Constitution n'a pas eu le temps d'entrer en vigueur. Le 10 octobre 1793, la Convention, par la voix de Saint-Just, consacre l'établissement d'un "gouvernement révolutionnaire dans le cadre d'un état d'exception", déclarant : « Le gouvernement provisoire de la France sera révolutionnaire jusqu'à la paix ». Il avait été convenu que la paix revenue, la Constitution serait ressortie de son arche de cèdre pour être appliquée. La guerre intérieure et extérieure et surtout le renversement de la Convention montagnarde sonnèrent le glas de son application.
Malgré sa non-application, la Constitution de l'an I garda un grand prestige auprès des forces politiques de la gauche démocratique française sous le Directoire, l'Empire et la Restauration. Ainsi, Gracchus Babeuf et la Conjuration des Égaux voulaient l'application de cette Constitution qui, même avec son apologie de la propriété, leur semblait être la plus égalitaire.
1793 n’est pas que du passé.
1793, c’est avant tout notre histoire, n’en déplaise aux réactionnaires de tout poil et de tous pays.
1793 est plus que jamais d’actualité, nos lendemains qui chantent, notre futur. Que vive la République sociale et démocratique inventée, pensée, agie, amorcée en cette année 1793.
Nous constatons avec lucidité que les grands médias qui appartiennent quasi tous aux riches propriétaires de groupes de presse sont amnésiques sur ce sujet et que de fait, trop peu de citoyens connaissent et honorent cet évènement pour ce qu’il représente comme porteur d’espoir.
Nous aurons l’occasion de discuter de toutes ces questions posées par la Révolution française lors du Banquet républicain et laïque que la Fédération de Haute-Vienne de La Libre Pensée organise le 23 septembre à la salle des fêtes de Saint-Brice sur Vienne.
Source principale de cet article : l’Humanité et l’Humanité Hors-Série, 1793 Robespierre et le peuple debout, mai 2023